Opposition camerounaise et TIC : l’ignorance !

Les leaders de l’opposition camerounaise, candidats à l’élection présidentielle du 09 octobre 2011, ont démontré lors de la récente campagne électorale leur ignorance de l’apport des TIC et des nouveaux médias dans l’organisation des élections crédibles et surtout dans la promotion de leurs idées et de leurs programmes politiques.

Dans un premier temps, l’utilisation des nouveaux médias, en particulier les réseaux sociaux, par ceux-ci a été catastrophique à quelques exceptions près. Ceux qui se sont efforcé à s’intéresser à Internet ont juste créé un site web pour véhiculer leurs programmes politiques. On peut citer parmi eux John Fru Ndi avec mysdf.org, Adamou Ndan Njoya avec udcparty.com, Bernard Muna avec benmuna.cm, Jean-Jacques Ekindi avec jeanjacques2.ekindi.com

ou encore Kah Wallla avec kahwalla.com.

En général sur ces sites web, pas d’interactivité avec les internautes. Or, le principe sur le web est que l’émetteur ne doit pas rester sourd et insensible aux observations et commentaires du récepteur qu’est l’internaute. Observations qui s’illustrent parfaitement avec les réseaux sociaux. Sur Facebook et Twitter, les opposants n’ont pas assez discuté avec les internautes de leurs programmes politiques, même si certains se sont démarqués. Plusieurs parmi eux sont restés insensibles à leurs questions et commentaires. Le leader du principal parti de l’opposition Ni John Fru Ndi sur sa page Facebook, n’a par exemple lancé aucune discussion sérieuse sur son mur Facebook, qui compte près de 4 000 amis. Pas surprenant, quand c’est son fils qui gère son compte.

Idem pour Adamou Ndam Njoya de l’Udc qui n’a même pas une photo de lui sur Facebook.  Ce qui n’a pas laissé indifférent les internautes qui s’en sont offusqués sur le net. Sur le site web de l’Udc un internaute s’insurge : « Pourquoi ne pas publier le site web http://www.udcparty ainsi que vos photos sur Facebook, Twitter, LinkedIn ou encore Viadeo et demander aux abonnés de les faire circuler? Aucune affiche, aucun prospectus, aucun  panneau publicitaire ou autres, présentant le candidat », demande-t-il à Adamou Ndam Njoya. Aucune réponse du candidat, vous vous en doutez bien. Des questions et avis des internautes sont ainsi restés sans réponses sur les murs des comptes Facebook et les sites web de nos leaders politiques.

Or, il est clair qu’aujourd’hui pour atteindre les jeunes, il faut aussi passer par Internet et ces réseaux sociaux dont ils sont fans. Barack Obama, Paul Kagamé et bien d’autres présidents en savent quelque chose pour les avoir utilisés. Une stratégie de communication en ligne est donc nécessaire et pas besoin d’avoir un budget faramineux pour ce faire.

Dans un second temps, nos opposants n’ont pas véritablement compris qu’avec les TIC on pouvait contribuer à améliorer significativement la transparence d’Elecam, bien que cet organe chargé de l’organisation des élections soit déjà autant contesté. Au fait, il est notoire qu’aujourd’hui les TIC contribuent à une meilleure organisation et gestion des élections dans les pays sérieux. L’opposition camerounaise ne s’est pas préoccupée des stratégies de gestion et de décompte des voix. Un logiciel a été offert à Elecam par le Programme des Nations-Unies pour le développement (Pnud) en mai 2010 dans ce sens. Il est baptisé SIGCE, entendez Système d’information et de gestion cartographique des élections. Un logiciel conçu exclusivement pour le Cameroun par le Pnud avec un partenaire local. Mais, comment comprendre que des Camerounais aient pu obtenir quatre cartes d’électeurs avec un même nom ? Comment comprendre que des morts aient pu voter et jusqu’à deux fois ? Quel logiciel aurait pu laisser passer ce genre de scandale ? Le SIGCE a-t-il véritablement été utilisé ? Si oui, est-il encore fiable ? Faut-il encore l’utiliser ? Des questions qu’on ne poserait sans doute pas aujourd’hui si l’opposition camerounaise avait été exigeante sur ce point précis.

Les opposants n’ont pas exigé avant l’élection un audit ou un contrôle du logiciel SIGCE et même du fichier électoral par ses membres ou par un cabinet indépendant. Car SIGCE, qui est aujourd’hui la propriété exclusive d’Elecam, n’avait jamais été utilisé dans un pays quelconque par le passé. Non loin du Cameroun, en République démocratique du Congo (Rdc) notamment, les opposants n’ont pas laissé une telle situation se passer. L’élection présidentielle est prévue aujourd’hui, 28 novembre 2011. Pendant des jours et des mois les militants de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) d’Etienne Tshisekedi, opposant historique, ont manifesté devant le siège de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) à Kinshasa pour demander l’audit du fichier électoral, l’accès au serveur de la Ceni ainsi qu’aux programmes et logiciels qui seront utilisés. Après trois mois de résistance (une manifestation tous les jeudis), la Céni a cédé le 22 octobre dernier et a accordé aux membres de l’Udps et à ses experts ce qu’ils désiraient.

«Nous félicitons le fait qu’après plusieurs mois d’insistance, la Céni revient aux bons sentiments et réalise que c’est tous ensemble que nous devons construire un processus électoral apaisé », s’était réjouit le Sg de l’Udps, Jacquemin Shabani à l’annonce de la nouvelle.  Au Cameroun, ce n’était visiblement pas la priorité des opposants. Pauvre opposition camerounaise ! Cet exemple congolais peut servir pour les élections législatives de l’an prochain.


Prochain article : comment Paul Biya a communiqué sur Internet pendant la campagne électorale.

Beaugas-Orain DJOYUM est journaliste au quotidien privé camerounais Le Jour. Il est par ailleurs le promoteur de www.digitalbusiness.africa et conseiller en E-reputation. Le suivre sur Twitter : @BeaugasOrain, sur Facebook : Beaugas – Orain DJOYUM. Mail : [email protected]

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